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Julien Prévieux au MAC : parcours en 5 œuvres mordantes

Le MAC de Marseille met à l’honneur le travail délicieusement politique, critique et plastique de l’artiste français Julien Prévieux, Prix Marcel Duchamp 2014, dans une exposition intitulée Mordre la machine. Parcours en cinq œuvres dont l’une, Pickpocket (2015), a été prêtée par la Collection Société Générale.

 

1. Lettres de non-motivation, 2000-2007

De 2000 à 2007, Julien Prévieux s’emploie à répondre par la négative à des offres d’emploi récoltées quotidiennement dans la presse. Le résultat, qui rassemble petites annonces, candidatures et réponses plus absurdes les unes que les autres, pointe le caractère artificiel du rituel de la lettre de motivation et les failles d’un système dans son ensemble. Intérêt pour l’économie et pour ce que le philosophe Elie During nomme « les formes comportementales réglées de notre quotidien », pratique de l’infiltration et sens de l’humour : les bases du travail de Julien Prévieux sont posées.

 

 

Julien Prévieux, Lettres de non-motivation, 2000-2007. Petites annonces et impressions A4.   

 

 

 

 2. What Shall We Do Next?, 2007-2014

Poussant plus loin sa curiosité pour les comportements normalisés, Julien Prévieux se penche, à partir de 2007, sur les gestes permettant l’utilisation de divers appareils – surtout dans le domaine des nouvelles technologies – qui se trouvent déposés auprès de l’agence américaine de la propriété industrielle avant que lesdits appareils ne soient commercialisés. Il en tire What Shall We Do Next?, œuvre en trois parties composée d’un film d’animation, d’une vidéo et de performances qui lui vaut le Prix Marcel Duchamp en 2014. Une chorégraphie des plus réussies entre virtuel et matériel, passé et futur, réalité et science-fiction.

 

 

Julien Prévieux, What Shall We Do Next? (Sequence #2), 2014. Vidéo HD, son, 16’47’’. Copyright photo : Julien Prévieux.   

 

 

3. Atelier de dessin - B.A.C. du 14e arrondissement de Paris, 2011-2015

Pour Julien Prévieux, l’expérience n’est pas un vain mot. En 2011 puis 2015, il organise ainsi un atelier avec des policiers parisiens auxquels il propose de tracer manuellement les diagrammes de visualisation des crimes et délits habituellement réalisés par ordinateur. Atelier après atelier, tandis qu’ils perdent leur fonction première d’aide à la décision, les graphiques en acquièrent de nouvelles, pour le moins inattendues. Permettant aux participants de réfléchir aux mutations de leur métier, ils se transforment surtout en œuvres abstraites tandis qu’ils jettent un pont entre des univers a priori étrangers.

 

 

Julien Prévieux, Atelier de dessin - B.A.C. du 14ème arrondissement de Paris, 2015. Encre sur papier calque, 67 x 52 cm. Copyright photo : Toni Hafkenscheid.   

  

 

4. Pickpocket, 2015

Dans la même veine, Julien Prévieux modèle en 2015 une sculpture abstraite, toute en acier et jeux d’équilibre, à partir des déplacements d’un pickpocket. Tirant parti de la proximité esthétique entre les productions issues des dispositifs d’enregistrement des gestes et mouvements, et celles résultant des recherches formelles des modernités artistiques, le plasticien déjoue les objectifs de surveillance et de contrôle ici à l’œuvre pour donner naissance à une forme pure… qui a rejoint la Collection Société Générale en 2015.

 

 

Julien Prévieux, Pickpocket, 2015. Aluminium brossé, médium, placage chêne, 250 x 150 x 150 cm.   

 

 

5. Anthologie des regards, 2018

Plus que jamais préoccupé par l’enregistrement du mouvement, Julien Prévieux s’intéresse pour le MAC à l’eye-tracking, un ensemble de techniques permettant d’étudier le comportement oculaire utilisées en marketing. Son Anthologie des regards figure en effet, sous forme de constructions géométriques en fil de laine, les regards portés par un groupe d’étudiants des Beaux-Arts de Marseille sur des œuvres du MAC. Souvenirs d’œuvres et œuvres en soi, ces compositions arachnéennes nous confirment ce dont on se doutait : Julien Prévieux sait aussi faire des pieds de nez à l’histoire de l’art.

 

Julien Prévieux, Anthologie des regards, 2017. Laine et colle à chaud, dimensions variables. Vue d’exposition, Blackwood Gallery, Toronto. Copyright photo : Toni Hafkenscheid. 

 

 

Aurélie Laurière

 

À voir > au musée d’art contemporain de Marseille, 69 avenue de Haïfa, Marseille 8e.  Jusqu’au 24 février 2019, du mardi au dimanche de 10h à 19h.

 

À noter > l’exposition se tient dans le cadre du festival Actoral, du 25 septembre au 13 octobre à Marseille ; elle est accompagnée d’une performance, Of balls, books, and hats, à la Friche la Belle de Mai samedi 29 septembre à 20h et dimanche 30 septembre à 15h30. 

 

Visuel du haut : 

Julien Prévieux, What Shall We Do Next? (Sequence #2), 2014. Vidéo HD, son, 16’47’’. Copyright photo : Julien Prévieux.