Jean-Baptiste Huynh à l’infini
En ce début d’année, le photographe Jean-Baptiste Huynh est partout : à Paris, le musée Guimet lui donne carte blanche pour une exposition rétrospective consacrée à son travail réalisé en Asie, "Infinis d’Asie" ; la galerie Lelong présente une série de ses portraits de femmes, "Woman" ; et enfin à Genève, la Galerie Patrick Gutknecht propose une sélection de clichés provenant de plusieurs de ses séries. L’occasion parfaite pour revenir sur l’œuvre singulière d’un artiste dont la Collection possède une photographie : Louvre - Portrait de femme noire. Focus.
Beauté
Né en France d’une mère française et d’un père vietnamien, Jean-Baptiste Huynh s’est formé à la photographie en autodidacte. C’est ainsi qu’il a mis au point un style élégant et épuré, écriture déliée qui lui a d’abord valu la sympathie d’écrivains tels qu’André Pieyre de Mandiargues et Marguerite Duras, puis l’a conduit à exposer, entre autres, à la Maison Européenne de la Photographie et au Louvre. Nourri de voyages multiples aux quatre coins du monde, son regard se pose avec la même précision sur ses contemporains que sur les œuvres d’art, les végétaux, les minéraux ou les cieux (« Lumière »). Son objectif en révèle une beauté apollinienne et hiératique qui leur est à la fois particulière et commune. La beauté, cœur du travail du photographe, qui depuis plus de trente ans, l’explore sans relâche.
Miroirs
Cette beauté nourrit sa pratique et se trouve au cœur de certaines séries – ses portraits de femmes, notamment (« Woman »), où Huynh cherche la beauté féminine « dans son universalité, son authenticité et son intemporalité à travers le monde », pour reprendre ses propres termes. C’est que chez Huynh, la beauté n’est pas qu’une forme, elle est aussi objet et moyen de connaissance. Ses portraits, souvent de face et exposé à hauteur de visage, fixent le spectateur, lui offrant comme un miroir – thématique centrale du travail de l’artiste, qui a consacré plusieurs séries à des miroirs anciens (« Miroirs », « Reflection ») – de son humanité : le photographe, dont les nombreux voyages en Asie ont été motivés par le besoin de retrouver, selon ses propres mots, les origines de son visage, rappelle par ce dispositif que l’on se voit dans tout, élargissant le particulier à des proportions cosmiques.
Cosmos
Jean-Baptiste Huynh aborde tous ses sujets avec une régularité absolue : toujours au même format, ses photographies montrent êtres vivants et objets sur un même fond noir, complètement décontextualisés. Visages, plantes, objets anciens deviennent ainsi un monde en soi, dans les lignes duquel le spectateur est amené à découvrir l’infinité du cosmos. Car paradoxalement, malgré cet isolement apparent, c’est bien la continuité que le photographe explore, comme le montre sa série « Monochrome », où tous les règnes de la nature sont présentés au même niveau : arts, hommes, animaux, minéraux, végétaux. La cohérence de son travail se fait le reflet de la cohérence du monde, tant dans l’espace que dans le temps, dont Huynh observe l’action avec patience, que ce soit sur un visage (« Huyen ») ou sur des artefacts anciens (« Louvre », « Guimet »). Chaque photographie comme une image de l’infini...
À voir > au Musée national des arts asiatiques – Guimet, 6, place d’Iéna, 75006 Paris, du 20 février au 20 mai, tous les jours sauf le mardi de 10h à 18h
À la Galerie Lelong, 13, rue de Téhéran, 75008 Paris, du 18 février au 11 mai, du mardi au vendredi de 10h30 à 18h et le samedi de 14h à 18h30
Visuel : Jean-Baptiste Huynh, Louvre - Portrait de femme noire, photographie, 180 x 180 cm