Women on paper
Jusqu’au 4 novembre prochain, l’Espace de l’art concret (Mouans‑Sartoux) rassemble quinze artistes femmes d’horizons différents autour de leur pratique commune du dessin. Parmi celles-ci, trois font partie de la Collection : les Françaises Aurélie Nemours et Agnès Thurnauer ainsi que la Slovaque Denisa Lehocka. L’occasion de croquer le portrait de ces trois personnalités.
Aurélie Nemours la rigoureuse
Ce n’est pas elle, la doyenne de l’exposition. Née en 1910 à Paris, la grande dame de l’art concret talonne de près la Russe Tatiana Loguine, née quant à elle en 1904, avec laquelle elle partage un apprentissage auprès d’André Lhote et une fidélité sans faille à l’égard de l’abstraction. Après un cursus à l’École du Louvre et une formation auprès d’André Lhote donc, puis de Fernand Léger, Aurélie Nemours s’engage en effet dès 1949 dans la voie de l’abstraction. Une abstraction géométrique faite de couleurs pures et de formes issues du carré dont la rigueur se trouve contrebalancée par une grande sensibilité voire une certaine spiritualité. Surtout connue pour sa peinture, Aurélie Nemours a produit un grand nombre d’œuvres sur papier. Dessins, pastels et gravures lui ont permis de s’exprimer dans des formats plus intimes qu’elle associait parfois à ses propres poèmes. Aux côtés de deux huiles sur toile, Société Générale possède d’ailleurs de l’artiste décédée en 2005 une sérigraphie tirée de la série des Rythmes du millimètre.
Agnès Thurnauer la rebelle
Marcelle Duchamp, Francine Picabia, Annie Warhol : c’est avec une série de sculptures pointant la prédominance masculine dans le monde de l’art par la féminisation du nom de ses hérauts que l’artiste franco-suisse Agnès Thurnauer, née en 1962 et diplômée des Arts Déco de Paris, se fait remarquer. Les mots – ceux des hommes – ont une importance capitale pour Agnès Thurnauer qui, sur la toile, le papier ou dans l’espace, cherche à se les approprier pour faire entendre sa voix de femme artiste. À l’EAC, un dessin de 2018 laisse ainsi deviner un mot court et choc, « now », derrière un entrelacs de lignes courbes et colorées tandis que dans la Collection, cinq acryliques issues de la série des Biotopes mettent en scène un contorsionniste revêtu d’une combinaison léopard – un être humain en somme – sur fond de coupures de journaux dont les gros titres sont repris par ceux des œuvres. Avec Agnès Thurnauer, il est souvent question d’écriture et toujours de lecture, celle du corps du tableau et des renvois à l’histoire de l’art.
Denisa Lehocka la touche-à-tout
Du haut de ses 47 ans, c’est bien elle la benjamine de l’exposition. Née en 1971 à Trenčín et diplômée de l’Académie des beaux-arts et du design de Bratislava, la Slovaque Denisa Lehocka ne s’interdit aucun médium – dessin, peinture, sculpture, installation – ni source d’inspiration – art conceptuel, cubisme, surréalisme. Elle questionne des sujets universels tels que le corps, la famille, la société ou la nature à travers ses expériences personnelles et quotidiennes dans un mouvement proche de ce qu’on appelle en littérature l’autofiction. Ses œuvres en deux dimensions présentent ainsi souvent, à l’instar de celle qu’expose l’EAC et de celle que détient la Collection, un fourmillement de techniques, notes et symboles dessinant des rébus aussi intimes que délicats.
Aurélie Laurière
À voir > à l’Espace de l’art concret, 06370 Mouans‑Sartoux. Jusqu’au 4 novembre 2018, tous les jours de 11h à 19h jusqu’au 31 août, du mercredi au dimanche de 13h à 18h à partir du 1er septembre.